Jour 3 : A la rencontre du Phaéton et des charmes de l'Ile
Activités :
Au
réveil le lendemain, nous préparerons notre petit déjeuner, puis nous
irons découvrir le joyau de l'île : le Phaéton. Nous progresserons à
travers des sentiers battus pour ne pas dégrader l'écosystème.
Une flore exceptionnelle à vue d'œil
La
végétation de l'île aux Serpents est très diversifiée. Elle est
composée de strates arborée, arbustive et herbacée. La strate herbacée
est de loin la plus importante. Ceci fait de l'île une steppe dominée
surtout par Andropogon gayanus et Brachiaria distichophylla.
La
nature argileuse et rocheuse du sol fait que la végétation est composée
d'espèces xérophytiques. Cette végétation est principalement composée
de plantes à latex et de baobabs. Les premières sont dominées par les
euphorbiacées telles que Jatropha chevalieri et Euphorbia balsamifera. Nous noterons la présence d'espèces à feuilles réduites telles que Cadaba farinosa, Prosopis chilensis. Des espèces à feuilles dures y sont également rencontrées comme Boscia senegalensis.
Toutes les caractéristiques de ces plantes sont une adaptation à la
sécheresse car elles contribuent à la limitation de la perte d'eau de la
plante par l'évapotranspiration. Cette adaptation à la sécheresse du
milieu fait que beaucoup de plantes perdent leurs feuilles pendant la
saison sèche et ne les retrouvent qu'à la tombée de la pluie.
En
cours de route, nous ne manquerons pas de remarquer que les espèces
ligneuses sont quasiment rampantes, ce qui est exceptionnel.
En
effet, la végétation qui se développe sur un sol à substrat basanite et
pauvre, diffère de celle de la terre ferme par sa taille et sa forme.
Les
ligneuses, dominées par des baobabs nains (environ 2 mètres de hauteur)
et des plantes d'origine américaine telles que l'euphorbiacée à latex,
ne se disputaient pas les quelques blocs sableux mais s'accrochaient sur
les rochers. Cependant, les rochers en forme de pics n'arrivaient pas à
les garder et elles étaient obligées de s'agripper sur la pierre. Mais
l'érosion a déversé les rares grains de sable, présents sur les rochers,
dans les ravins et les crevasses où se réfugie désormais la flore tout
en développant des stratégies de survie : rester à ras du sol.
Cette morphologie des arbres s'explique par le fait que les courants marins y soufflent très fort, le sol est de type basaltique et l'épaisseur de la couche de sable est très fine ; ce qui fait que les racines ne peuvent pas aller en profondeur, d'où la petite taille des espèces ligneuses dont les fruits ont néanmoins le même goût que ceux du continent.
Voyage à travers les âges
Toujours
sur notre chemin, des vestiges protohistoriques tels que des tessons de
poterie, des amas coquilliers, nous feront voyager à travers les âges.
Des
silex et des outils taillés dans des roches comme la dolérite et la
basanite ont été retrouvés dans l'île, mais ils sont actuellement
conservés au niveau de l'Institut Fondamental d'Afrique Noire (IFAN).
Ils témoignent d'une présence humaine sur l'île qui daterait du
Néolithique (ère vieille de 3000 à 9000 ans).
Les
amas coquilliers ainsi que de très nombreux tessons de poteries
attestent que la présence de l'homme sur l'île remonterait à 1000-2000
ans. Ce sont très certainement des pêcheurs de passage qui abandonnèrent
ainsi leurs "déchets de cuisine",
certains vestiges d'espèces de mollusques étant inexistants dans les
îles mais venant du large des côtes. La quantité faible des amas qui
sont peu étendus, dénote une occupation humaine faible et épisodique.
L'existence de ces îles a été signalée aussi au 15ème
siècle par les premiers navigateurs qui partirent à la découverte des
îles africaines. Ils visitèrent et décrivirent les îles de la Madeleine.
Les premières descriptions furent relatées par Gomes Eanes de Zurara en
1444 qui remarqua la présence de nombreuses chèvres. Les récits se
multiplièrent par la suite, on peut d'ailleurs relever un certain nombre
d'anecdotes intéressantes comme "l'île
est pleine d'oiseaux de mer, de pigeons etc., en si grand nombre que
l'île entière, couverte de fientes, semblait aussi blanche qu'une île de
craie" (W. Towrson, 1557) ou encore que les îles furent "cédées à perpétuité à la Couronne de France" (Traité signé par le Roi de France en 1765) par le Damel du Cayor, un ancien royaume du Sénégal.
La Case de Lacombe
Toujours
sur les traces du passé de l'île, nous verrons la case de Lacombe,
vieille de 250 ans et construite avec des débris de roche. Cette
construction inachevée est le symbole de la volonté du génie de l'île,
Ndeuk Daour Mbaye, de ne pas accepter d'habitat sur ces lieux.
En
effet, Lacombe était un français qui voulait vivre dans l'île et y
développer la culture de patate, alors il s'était mis à y construire son
habitat. Il voulait d'ailleurs y intéresser les populations indigènes
de Soumbédioune (les lébous). Seulement, à chaque fois qu'il croyait sa
case achevée, il la trouvait le lendemain quasi effondrée. D'après
l'explication de certains anciens, on trouvait à chaque fois à côté des
effondrements un bâton et des excréments humains. Cela signifiait
d'après eux, que s'il persistait dans son idée de construire, il verrait
les conséquences fâcheuses de son entêtement : le génie ne veut pas de
cohabitation. Et les ruines de cette case sont toujours présentes dans
l'île.
A côté, se trouve l'ancien poste de garde devenu maintenant un refuge pour les tarentes (Tarentola annularis)
qui sont une variété de salamandres. Là, il y avait en permanence,
toutes les semaines, des agents du parc dont le rôle était d'assurer la
protection et la sécurité de l'île, mais depuis 1985 ceci ne se fait
plus par manque de moyens. Sur notre chemin, nous pourrons trouver des
couleuvres sifflantes non venimeuses.
Par la suite, nous ferons un détour vers un site jadis occupé par d'autres types de reptiles : les tortues.
Petit détour à la plage des tortues
Nous descendrons jusqu'à une zone qui fut le lieu de reproduction de la tortue verte (Lepidochelys kempi)
: la plage des tortues. La disparition de plage de sable par le fait de
phénomènes naturels tels les fortes marées a fait changer de lieu de
ponte les tortues. En revanche, actuellement, il n'est pas rare
d'observer cette espèce de tortue en mer à proximité de cette plage.
Nous
avons sur cette plage un lieu de retraite spirituel fait de pierres
côtières où viennent prier souvent certaines personnes en raison de sa
tranquillité.
Le Phaéton en vol
Sous
un ciel bleu au soleil bronzeur, nous guetterons le Phaéton en vol.
Vous reconnaîtrez facilement ce bel oiseau rare d'environ un mètre au
plumage blanc avec des taches noires par endroits. Sa queue est
constituée de deux longues et gracieuses rectrices centrales. Son vol
est caractérisé par des battements d'ailes amples.
Mais chers observateurs, préparez-vous à être observé à votre tour ! Car le Phaéton, "paille en queue" n'a pas peur de l'homme. Il se laisse approcher et n'hésite pas à venir à la rencontre de son observateur, qu'il regarde avec curiosité.
La crique Nord, les cormorans et les aquariums naturels
Ensuite, nous remonterons pour aller visiter la deuxième crique de l'île aux Serpents : la crique Nord.
En
allant à cette crique, nous pourrons éventuellement observer une zone
de nidification du Grand Cormoran. Les cormorans, changent de lieu de
nidification chaque année à cause des insectes qui attaquent leurs nids
se trouvant au sommet des rochers.
Nous
pourrons admirer également à la crique Nord des aquariums naturels. Ce
sont de petites cuvettes sur les rochers qui emprisonnent l'eau. De
couleur verdâtre, ils prennent souvent en otage de jolis petits
poissons. A ses environs, nous pourrons observer quelques endroits qui
servent de réfectoire aux milans noirs.
Pendant l'hivernage, il y aura possibilité d'y voir des tortues terrestres.
Les Phaétons dans leurs nids
Nous
continuerons notre chemin en direction de la zone de nidification des
phaétons, en prenant toutes les précautions requises pour ne pas les
déranger. Dans des moments inoubliables que nous essayerons
d'immortaliser, nous observerons les phaétons dans leurs nids. En effet,
l'île de la Madeleine offre des conditions favorables à la
nidification. Les côtes, constituées de falaises, abritent de nombreuses
cavités dans lesquelles viennent nicher ces phaétons.
Il existe 500 nids dans l'île pour un millier de phaétons. Le Phaéton pond juste un œuf qu'il couve deux mois en permanence car s'il laisse l'œuf à l'air libre, il se gâte. L'incubation varie de quarante deux à quarante quatre jours. Elle est assurée tant par le mâle que la femelle qui alternent en moyenne tous les six jours. Quarante jours après l'éclosion, le petit commence à voler. Le Phaéton n'a que deux périodes de ponte dans l'année, c'est à dire tous les six mois.
Le baobab parasol
Situé
non loin de la crique Hubert, l'observation du plus gros baobab du pays
de par la forme rampante fera l'objet de notre dernière étape de
visite.
Retour au poste de commandement du parc et compte rendu de notre visite
Puis,
nous regagnerons la crique Hubert où nous attendra la pirogue qui nous
ramènera au poste de commandement. A l'arrivée, il sera tenu une séance
de restitution et d'échanges d'idées sur la visite de l'île avec le
conservateur et les écogardes.
Il
est interdit de prélever un quelconque objet de l'île. Il y a des
années de cela, l'équipe des écogardes avait trouvé dans l'île un
phaéton mort, ils ont alors décidé d'emmener l'oiseau avec eux au P.C.
pour l'empailler; mais à peine ont-ils quitté l'île qu'ils ont eu un
accident grave qui leur a valu des blessés, la pirogue est devenue
irréparable et le phaéton mort n'a jamais été retrouvé.
Visite du marché aux poissons de Soumbédioune
A
quelques encablures du poste de commandement, se trouve le marché aux
poissons de Soumbédioune, très animé et ouvert jusque tard dans la nuit.
C'est un important marché aux poissons qui abrite une plage bordée
d'une centaine de pirogues de dimensions variées. Ces pirogues aux
couleurs multiples embellissent la plage.
Nous
y irons pour avoir la possibilité d'observer l'arrivée des pêcheurs
lébous. En effet, Soumbédioune est un port de pêche traditionnel. En ce
sens, la découverte de l'arrivée des pêcheurs est une activité
culturelle de par la forme de pêche qui y est aussi traditionnelle. De
plus, il existe une sorte d'organisation tacite lors du débarquement des
poissons qui dénote de la solidarité naturelle de ce peuple. En effet,
lorsque les pirogues amarrent, les gens qui débarquent les poissons sont
ceux qui ne disposent pas de barques. En contrepartie, ils reçoivent
une part du poisson débarqué qu'ils pourront vendre pour leur propre
compte.
Ces
pêcheurs, très respectueux de la faune marine, libèrent toujours les
petits poissons et ceux jugés traditionnellement non comestibles. Ceci
résulte d'un souci de préservation de la faune marine.
La plage de Soumbédioune a également une vocation : celle de recevoir les sacrifices qui servent à apaiser la fureur de la mer ou à solliciter le génie protecteur de Dakar afin que la mer pourvoit plus de poissons, ou encore en cas d'accidents répétés, etc. Après les libations, les offrandes sont emmenées et déposées aux îles de la Madeleine, demeure du génie protecteur de Dakar.
Porte du Troisième Millénaire
Avant
d'aller à Yoff où nous séjournerons les derniers jours, nous ferons une
halte au niveau de la Porte du Troisième Millénaire. Le célèbre
architecte sénégalais Pierre Goudiaby Atépa s'est inspiré des îles
Lougnes pour la création et la réalisation de ce magnifique monument.
De
cette place qui donne lieu à des manifestations artistiques, la partie
centrale des îles Lougnes donnent l'apparence d'une statue de la Vierge
Marie.
Cette
étape marque la fin du programme de la journée. Nous rejoindrons
ensuite le village de Yoff pour y passer une nuit paisible. Là, nous
serons accueillis par des familles du village qui nous hébergeront
pendant les jours que nous passerons au village. Ceci nous permettra de
vivre en communion avec les villageois et de nous imprégner de leur mode
de vie en prenant part à leurs activités et gestes quotidiens (laver le
poisson, piler le mil, aller au marché, etc.)
Au réveil, nous irons à la découverte d'autres expériences de conservation de la nature et horizons où la culture est le centre de gravité. En effet, les habitants de Yoff sont très attachés à la religion traditionnelle qui fait appel à un ensemble confus de "génies".
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